Tournage d'un film sur le Maugré
Auteur : Omer HELLIN
- Début août 1975, une équipe de la télévision belge francophone (la RTB; devenue RTBF par la suite) débarqua à Maubray pour effectuer le tournage d’un court métrage sur le Maugré. Cette production s’inscrivait dans le cadre d’une série de reportages sur des « Histoires de Wallonie » conduits par le réalisateur Jean Brismée, du Centre de Charleroi, le but poursuivi étant de redonner vie avec les moyens techniques de l’époque à des récits réels qui se transmettaient essentiellement par voie orale et… qui fournissaient la matière aux veillées de jadis. La structure générale de l’émission qui servit de ligne directrice au réalisateur visa à définir le maugré dans une perspective à la fois historique, juridique et sociologique.
- Dans une première partie, le film relata les faits qui ravagèrent le Tournaisis et la région d’Ath aux 18e et 19e siècles, tandis que la seconde présenta une rétrospective de la dramatique affaire qui secoua Maubray au milieu du 19e.
- L’enquête fut menée par le présentateur Ronald Guttman. Elle fit appel à des reconstitutions jouées par des comédiens professionnels (René Hainaut et Guy Barbier) mais aussi, afin de préserver l’authenticité du scénario, à des amateurs qui n’étaient autres que des personnes du village, dont le bourgmestre Maurice Brabant, qui interpréta le rôle de Lacquement (= le Curé des Pourcheaux). C’est ainsi que Louis Lefebvre et ses fils (Louis et Richard), Jean Wattiez et son épouse, Paul Dellettre Junior, Henri Jacquart (et son attelage !), Michel Vinchent, Claude Parez, Edmond Roberte, Léon Hellin, René Maton, Rudy Vico, André Foucart, Didier Englebert, Dion Verdonck, Christiane Therain, Michel Darmusiaux, René Montegnies (ainsi que deux réservistes : Jules Gosset et Léonce Dereux) eurent droit aux honneurs de la caméra. D’autres participants venaient du pays de Liège et/ou de Jumet : il s’agissait de membres des fameuses marches historico-folkloriques de l’Entre-Sambre-et-Meuse. A ce sujet, il fut constaté lors du montage du film – c-à-d trop tard hélas – que les gendarmes présents lors de l’exécution de Lacquement portaient le bicorne (couvre-chef traditionnel de ces marcheurs) alors que, dans la réalité, c’était le bonnet à poils qui les coiffait à l’époque; la scène ne fut toutefois pas recommencée.
- Les scènes et prises de vues eurent pour cadre les lieux exacts des actes de mauvais gré perpétrés en cette période trouble et troublée. La photo ci-après présente une séquence de répétition où, sous l’œil du réalisateur Jean Brismée, Maurice Brabant (= Lacquement) donne la réplique au comédien René Hainaut (= le juge) :

Les deux photos suivantes montrent des scènes du tournage aux abords du couperet, sur le lieu de l’exécution (Marais de Maubray); on y voit notamment les gendarmes coiffés « par erreur » de bicornes, comme évoqué supra :
- Le 20 octobre 1975, les membres du cercle local Montbretia, quelques fermiers ainsi que les acteurs locaux purent assister en première version au PAT’s à la projection du film. A l’issue de celle-ci, un débat d’une durée de quarante minutes, animé par Joseph Lewcowicz (de la RTB) traita du maugré, de ses causes, de ses ravages, des meurtres qu’il amena et des différents faits récents remarqués dans la région :
- Le film - en couleur - d’une durée d'environ quarante minutes, passa sur les antennes de la RTB le 28 octobre 1975 . La Suisse et le Canada en ont acheté les droits; c’est dire qu’il fit aussi l’objet, à un moment ou à un autre, d’une diffusion à la TV dans ces pays.
Le débat qui suivit, filmé également, donna lieu à une émission télévisée différée.

- En 1983, c’est la Maison des jeunes (Odyssée 81) qui proposa à ses membres et aux habitants du village de revoir la projection du film :

Serge ROMMES a retrouvé ce court métrage et vous propose de le visionner ci-après. Le film est précédé d'une interview de Maurice Brabant.
N.B. :
A l’occasion de la réédition de l’ouvrage de Maurice des Ombiaux consacré au « Maugré » (éditions Labor) en 1986, le Foyer Culturel d’Antoing organisa une exposition à la fois didactique, historique et esthétique retraçant les diverses étapes de ce qu’on appelait la « haine de cense ». Lors de la séance de présentation de cette exposition, le film de Jean Brismée fut projeté; il fut suivi d’un débat contradictoire qui fit apparaître deux thèses : pour les uns, Lacquement était une sorte de saint condamné à tort, alors que pour les autres il n‘était qu’un tueur ! Une vue de la salle permet de reconnaître plusieurs Maubraisiens au sein de l’assistance :
