Maurice BRABANT
1924-2010
- Voilà un Maubraisien pur sang; n’a-t-il pas dit « Antoing est ma commune; Maubray est ma patrie » ? Doté d’un gène maubraisien indestructible, il était très sceptique quant au bien-fondé de cette fusion des communes, pourtant imposée par la loi. Epinglons à ce sujet le troisième couplet de sa parodie du Plat Pays, de Jacques Brel, écrite un peu avant l’intégration du village dans l’entité d’Antoing :
« Avec le cauchemar de la triste fusion,
Que les politiciens prêchent à profusion,
Sans souci de l’ardeur qui vibre en ce village,
Ils vont d’un coup d’estoc balafrer son visage,
Ce cher et vieux Maubray perdra jusqu’à son nom,
Avec grand désespoir écoutez-le mourir,
Ce doux pays qui est le mien. »
Que les politiciens prêchent à profusion,
Sans souci de l’ardeur qui vibre en ce village,
Ils vont d’un coup d’estoc balafrer son visage,
Ce cher et vieux Maubray perdra jusqu’à son nom,
Avec grand désespoir écoutez-le mourir,
Ce doux pays qui est le mien. »
- Maurice vit le jour en 1924 et effectua ses humanités au collège Saint-Ferdinand à Jemappes. Dans le contexte de la Belgique occupée, il fut amené à son grand regret à arrêter des études supérieures entamées à l’Ecole des Mines de Mons. De retour à Maubray, il s’engagea dans la résistance.
- Sa carrière professionnelle fut rectiligne : pendant 40 ans, jusqu’à sa retraite en 1984, il mit ses connaissances au service de la Banque de Bruxelles (devenue par la suite BBL, puis ING) et termina comme fondé de pouvoir. Le « groupe des anciens » de la banque fit alors appel à lui pour le présider.
- Ses premiers pas dans la vie associative du village eurent lieu au sein du cercle dramatique LA RENAISSANCE. Son père (Léon) en était le régisseur, mais en fait c’est lui qui tirait les ficelles. Sous sa conduite, et aussi en tant qu’acteur, des œuvres de choix furent interprétées au Salon Tanfin-Jurion deux fois l’an jusqu’en 1964; on retiendra essentiellement : le Comte de Monte-Cristo, le Bossu, les Misérables, Roméo et Juliette, Othello, les Trois Mousquetaires, Ben-Hur, le Maugré, la Pucelle d’Orléans.
- Au niveau sportif, c’est la balle pelote qui avait ses faveurs; il fit partie de l’équipe locale dès la fin de la guerre, et occupa même les fonctions de secrétaire de la Jeune Paume.
- En 1961, il contribua à la fondation du Syndicat d’Initiative; à l’extinction de celui-ci, quelques années plus tard, il fut alors à l’initiative de la création du cercle culturel le Montbretia.
- On trouve encore Maurice comme président d’honneur des anciens prisonniers de guerre (lui qui n’avait pas fait son service militaire !), secrétaire du Floréal, membre du Raccro, du Sourire artistique, de l’Amicale des anciens, de la chorale paroissiale, sympathisant de la fanfare L’Union. Ses vacances, c’est à Maubray qu’il les passait; pas question pour lui d’aller à l’étranger.
- Avec une telle présence dans presque toutes les sociétés du village et la grande popularité qui en découla, il n’est pas étonnant que lorsqu’il se présenta pour la première fois aux élections communales, en 1970, sur une liste d’ « intérêts communaux », il ait renversé la majorité en place et soit devenu immédiatement bourgmestre. C’est dans cette fonction qu’il donna la pleine mesure à ses motivations, à savoir : rendre service et participer activement au développement du village. Sa fierté, selon ses dires, était d’avoir transformé le village en une commune moderne : - réfection de toutes les routes, - égouttage fonctionnel, - obtention d’une bretelle d’autoroute, - sauvegarde du vieux canal, - vente en lotissements du marais de Maubray en vue de la construction de maisons, - implantation d’habitations sociales à la rue du sart.
- Hélas, fin 1976, les fusions furent pour lui et son équipe synonymes de relégation dans l’opposition. Il y resta pendant 18 ans, en tant que chef de groupe, c’est-à-dire jusqu’à la fin de 1994, époque à laquelle il passa la main. Mais même au sein de la « minorité », il demeura un adepte de la politique réaliste et passa d’ailleurs comme le « sage » du conseil, grâce à son désir de modération dans toutes les discussions. Il reste que Maurice, qui était par tempérament un homme d’action et de pouvoir, à l’esprit créatif étendu, a dû se sentir plus d’une fois gêné aux entournures et impuissant dans ce rôle d’ « opposant » qui était devenu le sien. Après 1994, il prit du recul par rapport à la politique. Au rang des regrets ou des échecs figure le TGV : non seulement il n’en acceptait pas le tracé mais il n’aboutit pas non plus à le faire passer sous l’autoroute.
- Maurice avait la plume facile; il fit œuvre d’écrivain mais aussi d’historien. On en prendra pour preuves les deux ouvrages qu’il a consacrés à l’évolution de la vie du village et à certains événements qui la marquèrent : « Maubray, terre ardente » et « Le Maugré ».
- Par nature, Maurice n’était pas à ranger dans la catégorie des « tendres », mais à partir du moment où, se jugeant lui-même comme étant « une grande gueule au service d’un bon cœur », on ne pouvait que lui pardonner ses emportements occasionnels ! On retiendra donc surtout de lui sa forte personnalité.
- La banque et la politique locale n’étaient pas tout pour lui; s’y ajoutaient : les assurances (il était agent pour le Boerenbond), la mutualité libre, le PSC de l’arrondissement, la croix-rouge, le foyer antoinien, le foyer culturel, etc.
- Diminué physiquement, Maurice s’est éteint (juillet 2010). Choyé par son épouse Ghislaine, il vécut les toutes dernières années de sa vie en évitant les contacts extérieurs, lui qui avait la fibre sociale surdimensionnée.